Prat’hic #37 : OMOIA, un jeu de cartes pour réviser les déclinaisons en cours de grec ancien

Vos pratiques sont fantastiques ! Régulièrement, ATC donne la parole à des enseignants pour qu’ils nous fassent découvrir une activité menée en cours de langues anciennes.

Aujourd’hui, allons à la rencontre de Charles Lièvre, professeur de lettres classiques dans l’académie de Normandie, qui a conçu un jeu grammatical pour ses élèves qui apprennent le grec ancien, et en particulier pour réviser un incontournables des cours de langues anciennes : les déclinaisons.

En Bref

Bonjour, pouvez-vous nous présenter en quelques mots l’activité “OMOIA, un jeu de cartes pour réviser les déclinaisons en cours de grec ancien”  ?

“OMOIA” (ou Ὅμοια) est un jeu de cartes collaboratif où les élèves cherchent à identifier un mot secret – un nom grec décliné – à l’aide d’autres mots qui constituent des indices.  

Avec quelle classe l’avez-vous menée ? 

L’activité a été menée au lycée Les Fontenelles à Louviers (27) à destination d’un groupe d’élèves hellénistes (niveau première). Les seize élèves du groupe-classe suivent trois heures d’enseignement par semaine.

 

 

Pour télécharger le jeu de cartes et les règles du jeu :

OMOIA-Grec

Règles-OMOIA

Aux origines du projet

Quelle est la genèse de ce projet ? 

L’activité s’inspire directement du jeu Similo, édité par Gigamic, auquel j’ai eu l’occasion de jouer à plusieurs reprises. Il existe plusieurs boîtes du jeu : les règles sont les mêmes ; seule la thématique des cartes varie (“contes”, “histoire”, “mythes”,…). Le jeu original consistant en la reconnaissance d’un personnage secret en fonction des similitudes ou différences visuelles avec d’autres personnages en jeu, l’idée était de l’adapter pour travailler de manière ludique l’analyse grammaticale.

Quels objectifs vous étiez vous donnés ? 

L’objectif était multiple :  permettre aux élèves de réinvestir leurs connaissances morphologiques des noms grecs des première et deuxième déclinaisons (notions de seconde) ; automatiser leur reconnaissance des désinences de la troisième déclinaison (thème à occlusive) observées et synthétisées au cours de la séquence qui précédait l’activité ; développer l’esprit d’analyse par la confiance en soi, l’entraide pour ainsi mieux s’approprier (et dédramatiser ?) le concept de flexion qui en effraie plus d’un.

 

Faber fit fabricando

Qu’ont eu à faire les élèves avant l’activité ?  

Strictement rien. L’activité menée entre dans le cadre d’un processus de répétition espacée afin de permettre aux élèves de réactiver les notions déjà apprises, tout ou en partie mémorisées. Auparavant, les élèves avaient pu observer et comprendre la flexion particulière des noms de la troisième déclinaison. Il était donc nécessaire de réinvestir ces connaissances pour en faciliter la mémorisation à long terme.

  

Qu’ont eu à faire les élèves pendant l’activité ?

La classe a été divisée en petits groupes afin de mener des parties à 4-5 joueurs. Cela suppose d’imprimer plusieurs jeux de cartes. 

Comme le précisent les règles du jeu, seul un élève du groupe connaît le mot secret. Il joue le rôle du “grammairien” : son but est de donner des indices à ses camarades – il ne doit pas parler ni faire de gestes ni communiquer de quelque manière que ce soit – pour leur faire deviner le mot et ainsi gagner la partie ensemble. Grâce aux indices, les autres joueurs, en se concertant, analysent les indices du “grammairien” et retirent du jeu les cartes dont ils sont convaincus qu’elles ne correspondent pas au mot secret.

En raison de ce temps de concertation, j’ai refusé aux élèves la possibilité de regarder dans leur cours les fiches synthétiques sur les déclinaisons.

A chaque tour de jeu, les rôles changeaient pour que tous les élèves du groupe se retrouvent au moins une fois “grammairien”.

 

Quel a été le rôle du professeur pendant l’activité ?  

Même après avoir expliqué les règles, je suis passé auprès de chacun des groupes pour vérifier la pleine compréhension des consignes. Ensuite, mon rôle consistait davantage à observer mes élèves. J’ai ainsi pu me rendre compte des différentes stratégies adoptées par ces derniers : certains “grammairiens” ont par exemple compris que la déduction était plus aisée si, au début de la partie, les indices étaient posés verticalement (les indices ont donc une similitude avec le mot secret). 

 

Les élèves ont-ils gardé une trace écrite ? 

Non. Il s’agissait davantage d’une activité, comme je l’ai précisé avant, pour consolider des acquis.

 

Quelle implication des élèves ? 

Tous les élèves sans exception se sont vraiment investis, même ceux qui sont habituellement plus en difficulté, à cause de l’aspect coopératif du jeu. La phase de délibération les amenait nécessairement à justifier leur choix, se remettre en question, se corriger : “si le grammairien a joué deux mots masculins verticalement, c’est que le mot secret doit être masculin” / “Mais tu es sûr que ce mot est masculin, et pas neutre, à cause de l’article devant ?” etc.

 

On fait le bilan

Quel est le ressenti du professeur ? des élèves ?

J’étais bien entendu satisfait de l’engouement suscité par l’activité, sentiment difficile à créer quand on doit travailler la grammaire. Les élèves n’ont pas vu l’heure passer et sont repartis avec le sourire. En ce qui concerne les objectifs de la séance, j’ai pu voir certains automatismes se créer, renforcés également par la similitude des désinences entre les déclinaisons : -α pour le neutre pluriel, -ων pour le génitif pluriel, -ας pour l’accusatif pluriel (terminaison commune aux noms féminins de la première déclinaison et les mots masculins/féminins de la troisième),…

 

Quelle “évaluation” pour savoir si les élèves ont compris ?

L’analyse morphologique des noms grecs (pour les déclinaisons étudiées) sera évaluée au terme de la séquence.  

Pour systématiser la reconnaissance grammaticale, il me semble nécessaire de retravailler cette compétence avec les élèves sous cette forme ou une autre au cours des prochains chapitres. 

 

Y-a-t-il eu des difficultés, des surprises ?

Certains élèves se sont retrouvés plus en difficulté dans le rôle du grammairien. Pour pouvoir donner des indices à ses camarades, cela suppose en effet d’avoir effectué une bonne analyse du mot secret au préalable. Pour cette raison, j’ai pu assister ces élèves en leur donnant des coups de pouce afin de leur permettre de continuer la partie. 

Le jeu n’est pas si simple ; on ne gagne pas à tous les coups, ce qui peut en frustrer quelques-uns. L’intérêt pour les élèves a été de comprendre en fin de partie ce qui avait empêché cette victoire : le grammairien s’est-il trompé dans son analyse ? Ou sont-ce les autres élèves lors de la délibération ? 

 

Changeriez-vous quelque chose ?

Pour empêcher qu’un élève se retrouve bloqué, peut-être l’on peut envisager un couple de grammairiens qui pourraient dès lors se concerter au moment de jouer les indices. 

L’intérêt du jeu de cartes est qu’il est évolutif : on peut tout à fait créer des cartes pour simplement se limiter aux noms des deux premières déclinaisons ou pour introduire d’autres déclinaisons. Sur le même principe, une adaptation en latin serait même envisageable.

 

Si vous souhaitez poser des questions à Charles Lièvre, n’hésitez pas à nous contacter, nous les lui ferons suivre.

Si vous souhaitez vous aussi raconter un de vos cours, n’hésitez pas à prendre contact avec nous !

A propos ju wo

Professeur de français et des options FCA et LCA dans l'académie de Lille. Passionnée de cultures antiques et de langues anciennes, attachée au rayonnement et à la promotion des cultures antiques dès l'école primaire. Responsable du concours ABECEDARIVM pour l’association ATC.

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